RoBeRT JoHNSoN eST-iL VRaiMeNT CoNSeNSueL ?

Robert Johnson

Tous les grands mythes du 20ème siècle sont passés sous les fourches caudines des journalistes dits d’investigation et de leurs confrères critiques.
Tous les mythes, de Marilyn à Elvis, de Jim Morisson à Hendrix, de Kennedy à Kennedy.
Tous, vous dis je. Tous.
Tous ?
Tous. Sauf un. Robert Johnson. Adulé des plus grands . Ou presque ! quid Hendrix – qui ne s’est pas beaucoup étalé sur le sujet – ?), et donc crédibilisé aux yeux des foules. Or, si c’est E.”God”C. qui le dit donc c’est vrai. Et comme Tonton Kiki les Ratiches lui emboîte le pas, avec une belle flanquée de bons apôtres (John Hammond, ABB, Alexis Korner, Peter Green, Jo-Ann Kelly, etc…) lui filant le train pour répandre la divine parole sacrée, autant dire tout de suite que la messe est dite.
Johnson est auréolé, sanctifié, canonisé. Bref, divinisé.
Pourtant le navire, cette hype indiscutable car indiscutée, à peine effleurée, petit à petit, commence à prendre l’eau.
Car s’il est vrai que c’est un guitariste comme on n’en fait plus (encore que…), il faut avouer que c’est assez difficile de rentrer dans cet univers sombre, souvent morbide et toujours imparfait car si mal enregistré (même pour l’époque).

Pour avoir essayé maintes et maintes fois, très exactement depuis le 24 décembre 1968 quand j’ai eu Wheels On Fire (avec la hideuse pochette allemande) et l’extraordinaire version de “Crossroads” avec les anthologiques solos de Clapton, et son chant magnifique, je parle donc en connaissance de cause, je voulais absolument goûter. M’imprégner et me convertir, moi qui m’était initié au blues grâce à tous les Grands Bretons. Du coup, j’étais sacrément content quand l’album King Of The Delta Blues est sorti au printemps 69. J’avais même été jusqu’à le voler, c’est dire si j’étais motivé.
J’ai écouté. Une fois deux fois, quatre fois, etc… Et je n’ai pas été convaincu.
Le doute m’a repris quand Sony a sorti la totale (The Complete Recordings) en 1992. Pareil, à l’écoute, même effet de doute. Ce n’est pourtant pas faute d’avoir essayé encore et encore, notamment lorsque j’ai rédigé le Bopkouizz questionnaire et les réponses du questionnaire.

Et je suis toujours sceptique. Que voulez-vous ? Pas ma faute. J’adhère pas. Voudrais bien, mais peux pas. C’est souvent assez pauvre, mou du genou. C’est pas qu’un peu bâclé, laissant un goût d’inachevé dans l’arrière-bouche.
La voix ? il y manque cette force dynamique que savent donner les Blacks… cette impulsion léonine qui transcende tout le blues, celle qui crédibilise les sempiternels thèmes du genre. Cette puissance dégagée, même dans certains falsetto (JB Lenoir ou Skip James par exemple) est absente, voire inexistante. Donc, c’est souvent monotone puisque trop souvent monotonal. Au final, c’est un peu rébarbatif.
Quant aux textes, rien de bien nouveau.

Le problème, c’est, forcément, que l’on est bien seul dès que l’on ose dire que Johnson, c’est pas vraiment ça. On se sent mis sur la touche et exclu. Faut toujours être dans le consensuel. Pas de vague quand on est à contre-courant. Sinon, on récolte la tempête…
Alors, évidemment, quand on s’aperçoit qu’on n’est pas totalement isolé !… et que d’aucuns, en marchant sur des œufs, commencent à égratigner un chouille le mythe….
Témoin ce commentaire vu sur Amazon à propos du double CD “The Complete Recording”. Il m’a rempli d’aise, car il synthétise très bien ce que je pense (*).

Look – I really like Robert Johnson, I think he’s great. And if you’re a blues fan you should probably have this CD. HOWEVER, Robert Johnson isn’t half as good as people say. Over the years he has been know as the “master of the Delta blues” or whatever. But he’s not. In fact far from it. People like Charley Patton, Willie Brown, Son House, Blind Joe Reynolds, Bo Weavil Jackson, Skip James, Lonnie Johnson, and Kokomo Arnold were all just as good or in many cases, better Delta bluesmen than Johnson. Not to mention people like Gary Davis, Little Hat Jones, Blind Lemon Jefferson, Blind Willie McTell, Blind Boy Fuller, Blind Blake, and Blind Willie Johnson, who aren’t from Mississippi.
Furthermore, I’d to say how ridiculous the liner notes are. Keith Richards in particular is…not a particularly good (maybe original) guitar player. He talks about how Johnson must have had three brains to play and sing all he did. I used to believe this myself, and for a while played Robert Johnson’s songs. Though, surprisingly, these songs were some of the easiest ones I know. And even though I haven’t practiced them in almost a year, I can still play them note-perfect. For me, it was much harder to play the fast picking songs of Skip James.
Maybe if we look at the songs themselves, you can understand that Johnson is far from being original. For example, “I Believe I’ll Dust my Broom”‘s lyrics are derived from Kokomo Arnold’s “Sagefield Woman Blues”, which included the exact lines of the famous title verse. Also, as a guitarist and singer, Kokomo Arnold is much more accomplished than Johnson. “Come on in My Kitchen” has the same melodic line as the classic “Sittin’ on Top of the World” by the Mississippi Sheiks. “32-20 Blues” contains the EXACT same lyrics as Skip James “22-20 blues”. “Walkin’ Blues” and “Preachin’ Blues” are both Son House tunes. “If I had Possession over Judgement Day” and “Travelin’ Riverside Blues” are derived closley from the classic “Rollin’ and Tumblin’ Blues” by Hambone Willie Newbern. “Phonograph Blues” is from Cliff Carlisle’s “That Nasty Swing”. “Sweet Home Chicago” is from Kokomo Arnold’s “Old Original Kokomo Blues”, in which the title verse is included. “From Four until Late” is right from songs like Charley Patton’s “Tom Rushen Blues” or Skip James’ “4 o’Clock Blues”. “Hell Hound On my Trail” is from Skip James’ style and mostly heavily his “Devil Got My Woman”. “Malted Milk” and “Kind Hearted Woman Blues” are from Lonnie Johnson. “Love in Vain Blues” on of Johnsons’ most praised songs may be one that has the least amount of originality. It’s melodic line is from Leor Carr’s “When the Sun Goes Down”, and some of it’s “beautiful lyrics” are from Blind Lemon Jefferson. Lastly “Milkcow’s Calf Blues” is derived from Kokomo Arnold’s “Milk Cow Blues” (which has much better slide and vocals). All of these songs were recorded before Johnson started seriously playing or recording. AGAIN, I respect Johnson, but am confused by his fame.

In fact most of his influences (Charley Patton, Kokomo Arnold, Blind Lemon Jefferson, etc.) were much more popular than Robert Johnson was in his time.
So I hope my review has been helpful, and I hope that people who only know acoustic blues from Robert Johnson would check out some of his predecessors.

Ca remet les choses à leur juste place, et là, j’adhère totalement, d’autant plus que j’ai toujours eu un grand faible pour Skip James. Que j’ai connu grâce à EC et Mick Abrahams. Remember “Cat’s Squirrel”.

Et encore cet autre, sur Wikipedia :

Blues musician and historian Elijah Wald feels that Johnson’s major influence is on rock — particularly on white rock. He has made the controversial appraisal that As far as the evolution of black music goes, Robert Johnson was an extremely minor figure, and very little that happened in the decades following his death would have been affected if he had never played a note.] Assessments such as Eric Clapton’s of Johnson as “the most important blues musician who ever lived,” says Wald, attempt to expand Johnson’s reputation. Wald argues that Johnson, although well traveled and always admired in his performances, was little heard by the standards of his time and place, and his records even less so. (“Terraplane Blues,” sometimes described as Johnson’s only hit record, outsold his others but was still a minor success.) If one had asked black blues fans about Robert Johnson in the first twenty years after his death, writes Wald, “the response in the vast majority of cases would have been a puzzled ‘Robert who?'” Musical associates such as Johnny Shines also stated that in live performances, Johnson often did not focus on his dark and complex original compositions, but instead pleased audiences by performing more well-known pop standards of the day”.

On pourrait multiplier les exemples. Pas forcément à l’infini. Mais, juste au passage, mentionnons la fameuse polémique sur le diapason des enregistrements. Elle traine un peu partout sur la toile, sauf sur les sites des inconditionnels !!!! Ben voyons…

Quant à son légendaire style de guitare (très fort il est vrai, encore que…), celui qui ébouriffe les ouïes de Kiki les Ratiches, qu’il me soit permis de préférer celui-ci-dessous (Mississipi Fred McDowell “Goin To The River”!) qui est, pour moi, l’incarnation de ce qu’est le “BLUES”: une INCANTATION.
Je sais : tout ça, c’est comme dire, dans notre beau pays que l’on préfère Nouillorque à Rome ou Londres, on risque de se prendre une volée de bois vert ou non.
Mais que voulez-vous ? Je préfère NYC ! Même solitaire, on y est moins seul !
Ouèche !!

Professor Beeb HOPO

(*)  Publié le 16 mai 2003 par egg-shell (Wellesley, MA United States)

 

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9 Commentaires

  1. Compos connus même par ceux qui n ont jamais entendu parler du Blues Delta..déjà par les nombreux grateux qui lui rendent hommages régulièrement…son mystère , pacte diabolique !!sa fin empoisonné par un mari jaloux trois tombes le jour du trépas bien on ne sait pas vraiment…ça suffit a planter l ultra légende qui perdure encore…après les enregistrements tu as raison un peu sourd ..voix assez faible..on dirait une énigme fantomatique ..the culte ultime ..mais tu as toutafé le droit de pas vraiment comprendre et te foutre de l avis des autres royalement ….

  2. Robert Johnson “érigé en égérie” (marrant ça) du Delta blues, un surdoué mais par la même occasion pas forcement représentatif alors que Son House ou Bukka White plus ancien……

  3. Vrai que les enregistrements ne sont pas vraiment top.. mais un mythe reste un mythe..la vie la rencontre au détour d’un croisement ..juste deux photos…sa fin emprisonné ..aucune tombe ou plutôt trois(qui peut dire je repose dans plusieurs sépultures même pas Elvis) suis pas une grande spécialiste de la technique tout le monde a dans sa vie entendu un morceau de Robert ..même nos grands mères moi j’ adhère totalement…

  4. Avant tout un mythe et une légende.Une anecdote marrante quand Columbia a ressorti la complète en 1990 : ils se sont faits tellement de blé et vu qu’il n’y avait ni descendants ni ayant droits, ils se sont quand même sentis comme obligés d’ériger un petit monument pour lui à l’endroit supposé de sa mort, le tout au doigt mouillé surement à un carrefour ;-) !

  5. Salut HiDeHo Man, Na, nan et non !!!
    Jamais je ne dirais qu’Hendrix est “inaudible”. Sans parler de “Electric Ladyland” (qui est de mes 10 meilleurs albums), ce qu’il a fait au Fillmore avec le B.O.G. est un sommet guitaristique, quelque chose qui touche à l’Absolu. Je dirais juste, mais c’est une question de goût et de subjectivité, que je préfère Clapton durant la période Cream. Il m’a touché et me touche encore, comme peu de gens l’ont fait. Par contre, historiquement et objectivement, Les Paul est bien plus inventif parce qu’ inventeur, qu’Hendrix. Et n’oublions pas que EC se servait de la wah-wah AVANT Hendrix. A part ces deux réserves, il est hors de question de voir apparaître ici le moindre doute sur l’audibilité du Gaucher de Seattle. Rien que son art de retomber sur ses pieds, quand il est complètement barré, est à la limite du Génie. Et le mot est très faible. Simplement, je regrette de n’avoir compris l’importance réelle d’Hendrix que le jour de sa mort, même si je me doutais que l’intro d'”Hey Joe” (ne parlons pas d'”All Along The Watchtower”) touchait à la révolution guitaristique, et qu'”Electric Lady Land” est, au moins, l’un des pivots de la musique “improvisée” et enregistrée.
    Keep On HiDeHoding.

  6. Voilà bien un article comme je les adore ! Je suis comme toi, BeeB : je n’ai jamais accroché réellement à Robert Johnson. En revanche, comme tout le monde, j’ai été touché par son histoire. On (“on” est un con, mais c’est les journalistes) en a fait une sorte de héros romantique, avec cette histoire de cul qui finit mal. Du coup, c’est le mythe qui prend le pas sur le musicien. Dieu sait (c’est normal, lui c’est pas un con) qu’il y en a pourtant eu des centaines des histoires morbides de bluesmen losers (et combien de milliers n’ont pas eu la chance d’avoir une seule session “de rattrapage” enregistrée). Bref, c’est comme tout : un peu de discernement, d’oreille et d’intelligence, mais surtout de libre-arbitre et on se sent mieux avec sa conscience et sa discothèque ! J’attends maintenant le prochain article où quelqu’un va enfin me dire qu’ Hendrix c’est inaudible !* *ça viendra sûrement pas de Crosstown Traffic…

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