The HoWLiN’ WoLF SToRy … et celle de KiLLiNG FLooR

Howlin' Wolf
Howlin' Wolf
Howlin Wolf © Unknown

Possédant ce dévédé (The Howlin’ Wolf Story) depuis sa sortie en 2002 et n’étant pas un ripper dans l’âme, j’ai attendu avec une patience de vautour une publication sur TonTube de l’intégrale du blouzomentaire ci-inclus. Las ! Tout ce que je voyais était saucissonné en plusieurs fichiers.
Une hérésie totale en regard du bonhomme et de son empreinte gigantesque sur le blues et le rock. Déchirer le loup ? Nan, jamais. Hors de question. Alors avec une patience de ….loup, j’ai attendu des années et j’ai enfin réussi à ripper ce document imparable.
NB : Pour illustrer ce film dont une séquence d’anthologie débute à 36’39 pour se terminer à 39’58, j’ai axé l’article sur une pièce mortelle (!) de Chester Burnett, Killing Floor.

S’il me fallait citer, là, tout de suite, sans réfléchir davantage, un seul nom, juste un seul au titre du bluesman le plus influent, le premier qui me vient à l’esprit c’est Chester Burnett, alias “Howlin’ Wolf”. Le “loup hurleur”, masque derrière lequel se cachait Chester Burnett, un bébé qui, à l’âge adulte mesurait 1,90m, pesait 136 kilos et dont la pointure des coussinets avoisinait le 49 fillettes. 
Ô bien sûr, il y a Muddy Waters, Willie Dixon, les Three King (Albert, BB et Freddy), John Lee Hooker ou Jimmy Reed. Mais, rien à faire, à mon avis, il les supplante tous.
D’ailleurs, la quasi intégralité des plus grands guitaristes (et même des moins grands) a repris au moins un morceau du loup. Ils n’ont pas tapé que chez lui, mais quand même… La slide de Brian Jones sur la cover stonienne de Little Red Rooster, un son quasi inconnu en 1964, les VIP’s qui reprennent Smokestake Lightnin en l’étalant sur plus de six minutes et les Groundhogs, du ô combien génial TS McPhee, qui inscrivent une version à tomber par terre de Natchez Burnin. Rien que ça, c’est une révolution.
Mais le monde fut littéralement renversé par un événement qui a bouleversé totalement l’ordre établi. Et c’est sur un titre de Wolf, Killing Floor, que le branle-bas eut lieu.

Flash-back en 1966 et téléportation à New York. 
Chas Chandler, bassiste des Animals alors en tournée aux États-Unis, propose à un jeune guitariste noir de venir à Londres et de tenter d’y lancer une carrière plus digne de ses talents que le peu de reconnaissance dont il jouit aux States.
Le guitariste en question s’appelle Jim Marshall Hendrix. Il va mettre deux conditions non négociables à ce départ.
Howlin' Wolf– Partir à Londres ? OK, pas de soucis. Sauf que je veux essayer ces amplis [les Marshall].
– …. Et je veux aussi rencontrer Eric Clapton, tu le connais ?
– Mais je les connais tous ! Clapton, Townshend, Beck ….. you name it.
– Nan, je veux rencontrer Clapton, juste Eric Clapton.
– OK !

Hendrix arrive à Londres le samedi 24 septembre 1966. Une semaine plus tard, le samedi 1er octobre 1966 au Central London Polytechnic situé dans Regent Street, les Cream sont sur scène. C’est un trio britannique. En réalité le premier power trio et le premier super groupe du rock. Deux très grands musiciens de jazz-blues : Jack Bruce – basse et chant – et Ginger Baker – batterie et chant. Un musicien de blues-rock : Eric Clapton : guitare et chant. La crème des groupes disait-on à l’époque. D’où le nom, Cream. Ce qui est d’autant plus vrai que – rappel d’importance et l’on verra pourquoi par la suite – Clapton était surnommé Dieu par ses fans. On ne pouvait pas trouver mieux, ni plus technique dans tout Londres que ces trois-là à ce moment-là. De plus, Bruce et Clapton jouent sur des stacks Marshall, les amplis dont la renommée court à la vitesse d’un cheval au galop. Des amplis ? Pas du tout. Des monstres.

Chandler entre dans la salle accompagné d’Hendrix guitar-case à la main. Il demande au trio si ça ne le gênerait pas de taper un bœuf avec ce jeune guitariste. Devant un tel toupet, Cream accepte. Hendrix monte sur scène. Au lieu de se brancher sur l’ampli lead de Clapton, il choisit celui de Bruce qui ne voit pas la chose d’un bon œil. Et il aura raison. Le gaucher de Seattle se lance alors dans une version ahurissante de Killing Floor. Là il se sent à l’aise … tellement à l’aise qu’il se laisse aller complètement. Il bouffe ses cordes, passe la Fender derrière la tête, entre ses jambes, joue la gratte sur la nuque qui justement lui grattait le cou. Il en oublie les tous sets passés à accompagner (en s’ennuyant grave mortel) une bonne partie du gratin de rythm’n’blues américain, les Isley Brothers, Little Richard et Curtis Knight avec lequel il jouait déjà ce blues dont il connaissait toutes les notes par cœur. Sur scène la différence entre les deux guitaristes est monumentale. Les pirouettes de haute voltige d’un Hendrix totalement désinhibé, auront raison face à un Clapton, puriste et missionnaire du blues anglais de l’époque, donc totalement coincé.
Le solo qui s’en dégage laisse God pantois. Tant et si bien qu’il débranche sa mythique Gibson Les Paul, claque les talons et retourne dans les loges : Dieu venait de recevoir un coup de foudre ! Bon joueur, il s’incline et va même jusqu’à se faire friser les tifs en hommage. Lui et Hendrix resteront très amis… Et Chas Chandler avait tenu ses promesses.

Howlin' Wolf
© Doug Felton

Toutefois, Killing Floor ne saurait se limiter à ce fait divers qui changea radicalement la face du rock et celle du blues. C’est une composition à travers laquelle de très nombreux auteurs et historiens du blues (1), et pas des moindres, ont cru voir une métaphore relative à des abattoirs. Et se sont plantés.
Car voilà. Hubert Sumlin, l’homme qui officiait derrière Howlin’ Wolf en tant que guitariste de génie, suffisamment en tout cas pour inspirer Clapton et Hendrix, bien avant le coup de théâtre narré plus haut, précisera que,  “Non, il n’était pas question d’abattoirs mais de l’une des bonnes femmes du Loup. En fait, la deuxième, Helen, lui avait tiré dessus avec un fusil à chevrotine à double canon par la fenêtre du deuxième étage. C’est à cause d’elle, oh mec, qu’il a écrit cette chanson. Chaque chanson qu’il a écrite, raconte une histoire vraie, un vrai moment de sa vie …[…] Il revenait d’une tournée et Helen l’a envoyé chez un commerçant pendant qu’elle préparait un plat pour fêter son retour. En fait, pendant qu’il était parti, elle fouille le bus de la tournée, histoire de trouver une preuve de batifolage de son mari. Et elle a trouvé des sous-vêtements féminins. Sauf que c’était l’un des musiciens et, elle, elle pensait que c’était son mari.”
C’est du moins ce que Sumlin confie à Debra Devi (2) qui met par la même occasion un terme définitif à la légende avalisée par Ken Chirpkin, John Garwood et Fred Sokolow (3), selon laquelle Killing Floor aurait été inspiré par le Hard Time Killing Floor de Skip James.
En revanche une chose est certaine : sur l’enregistrement original il y a une belle brochette ! Howlin’ Wolf (chant), Hubert Sumlin (guitare électrique), Lafayette Leake (piano), Andrew McMahon (basse), Sam Lay (batterie), Arnold Rogers (sax ténor) et Donald Hankins (sax baryton). Je revérifie pour voir si je n’ai pas oublié quelqu’un… Eh bien si, mais c’est Great God …. Buddy Guy (guitare acoustique). Lequel Buddy Guy est une influence prépondérante de… ? de …. et de ????
Nan, pas ça, ne me dites pas que vous n’avez pas trouvé !  

Ouèche 

Professor BeeB HôPô

PS : tant qu’on y est, un petit jeu. Dans le film, au début, il y a une séquence télévisée d’une très grande émission américaine où figure l’une des rares (sinon l’unique) apparition du loup dans les lucarnes yankees. Une fois présenté par Sa Majesté Brian Jones et Sir Mick, Howlin’ Wolf se lance dans une version tellurique de How Many More Years. Il est accompagné par le groupe de l’émission dans lequel joue un guitariste de légende. Quel est le nom de ce guitariste ? Cadeau surprise pour la première bonne réponse.

(1) Par exemples – James Segrest and Mark Hoofman dans leur biographie Moanin At Midnight The Life and Time of Howlin Wolf – Thunder Mouth Press NYC 2004. De même Will Romana dans la biographie qu’il consacre à Hubert Sumlin’ : Incurable Blues, The Troubles and Triumph Of Blues Legend Hubert Sumlin – Backbeat Books, Montclair 2005
(2) Dans une interview précédant la rédaction de son livre The Language of the Blues : From Alcorub to Zuzu – Billboard Books 2006
(3) Le relevé Howlin’ Wolf (featuring Hubert Sumlin on guitar) – Hal Leonard Corporation 1996

 

Professor
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22 Commentaires

  1. 1m90 c’est ma taille, 49, exactement ma pointure.
    Pour les 136kg, je pense les avoir frolés, mais bon, je suis bien redescendu depuis !
    Bises

  2. Toujours un régal de lire tes mots …” le solo qui en ressort laisse God pantois ” :))) excellent! A part ça pour le petit jeu , je crois que je suis un peu en retard mais j’aurais dit James Burton comme ce Denis plus haut … :)

  3. Quelle heureuse nouvelle cher Prézidan ! Merci à toi, j’attends l’heureuse nouvelle avec curiosité, un calin au loup, ouèche !

  4. Nos bureaux ont été littéralement submergés, c’est à dire qu’ils ont été submergés sur tout le littoral, par les courriels d’un certain Denis Dugas, dit Dédé Les As, s’inquiétant de savoir s’il n’y a avait pas une confusion d’identité dans le nom de gagnant
    Effectivement notre secrétaire a fait une crise de confusionnisme aggravé et s’est donc mélangée les nougats. Elle a pris mon gars Didier à la place du gars Denis et ça a failli faire des dégâts chez le gars Dugas. Ben mon gars ……
    Que celui-ci soit donc bel et bien rassuré : il a (du)ga…gné ce grand jeu.
    Il recevra son cadeau très bientôt, cadeau que des cadeaux comme ça, y’a que Notre PRéZiDaN bien aimé qui sait les trouver.
    Ouèche !
    Prof.

  5. Hello
    j’ai la bonne réponse, mais je ne vois pas de Didier qui l’a trouvé parmi ces 11 réponses, suis-je le gagnant ?

  6. Hello Prezidan,
    j’adooooooore le Woooooolf
    alors pour Buddy Guy, roi du West-side, il est l’influence majeur de Clapton mais surtout de Jimi Hendrix, c’est Hendrix qui le dit dans une interview que j’ai entendu il y a pas plus tard que 2 semaines, est-ce bien ça ?

  7. Dans la mesure où Toi, PréZident BôLoulou, tu es une bible du blues… Je me sens tellement humble devant tant de connaissances, je ne me risquerais pas à répondre une grosse bêtise.
    Respects et Révérence au meilleurs des Hurleurs…. ouèèèche !

  8. J’ai une certaine tendresse (et admiration) pour Willie Dixon qui, pour moi, représente “l’Aristocratie” (avec ce que cela peut avoir de bon côté) du Blues. Un peu comme Duke Ellington avec son grand orchestre. Des princes, quoi ! Ceci dit si tu devais faire la liste de TOUS les Bluesmen et leurs bios (de surcroit, intimes), tu en aurais pour l’année. Au moins ! Comme toi, je suis toujours aussi étonné de ne pas avoir tout de suite en tête les grands noms. J’ai eu tellement de plaisir (et bon ! Disons le : d’amour !) à voir et photographier les concerts de Son House, Sonny Terry et Brownie McGhee, Bukka White….. et j’en passe (je ne veux surtout pas faire un contest idiot de “name dropping”) qu’il me désole souvent de les oublier tous. Alors je me dis que si ma mémoire immédiate laisse à désirer au moins mon cerveau et plein de sons. Keep on rockin’! Merci pour ton travail et prends soin de toi.

  9. @Philippe
    Non je ne suis pas dur avec Willie Dixon. Surtout pas. J’ai du être l’un des premiers à avoir son album sur CBS. Et si tu savais tout ce que j’ai fait pour l’avoir …….
    Je dis juste “Ô bien sûr, il y a Muddy Waters, Willie Dixon, les Three King (Albert, BB et Freddy), John Lee Hooker ou Jimmy Reed. Mais, rien à faire, à mon avis, il [Howlin’ Wolf] les supplante tous.” Donc je serai dur avec eux aussi. Alors que ce sont des gens avec lesquels je me suis construit.
    Tututu, c’est impossible.
    Et comment serait-ce possible alors que trois d’entre eux sont en bonne place ici ????
    Ouèche !
    Prof.
    Par contre, j’ai omis SBW II, JB Lenoir, Mississipi John Hurt, Elmore James, T-Bone, Lonnie Johnson, etc …..

  10. Tu es dur avec Willie Dixon ! C’est tout de même lui l’auteur de “Little Red Rooster” (entre autres) ! Il est plus classique mais c’est un grand compositeur et beaucoup lui doivent un max.

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