éVeLyNe CouTaS 1/2 RaDiCaL PoSTuReS

Evelyne Coutas

Quand on parle photographie rock dans l’hexagone, les noms qui viennent à l’esprit sont toujours les mêmes : Perrier, Leloir, Gassian, Tarlé… Et l’outsider, dans tout ça ? Car outsider il y a ! L’outsider, c’est Évelyne Coutas qui expose 36 photos du 20 mai au 10 juillet, pendant 50 jours donc…
Et comme  Bop-Pills ne recule devant rien, à la clé, un diaporama des meilleurs clichés du “Raton”.

Ça se passera à Bruxelles sur les murs de la Galerie “Les Filles du Calvaire”. Subséquemment, reste plus qu’à prendre un tchou-tchou direction Bruxelles, oui mon chou ! Parce que la galerie où l’événement a lieu n’est pas à Paris, mais chez les Belges, une fois foyez-fous. C’est boulevard Barthélemy, sur les bords du Hainaut. Ça aurait pu s’appeler quai du Hainaut, mais on est chez les Belges, alors… Il faut y aller parce qu’Évelyne Coutas expose et fait le mur. Un mur qui s’appelle 36 poses. Comme dans les vielles pellicules argentiques qu’on achetait chez le photographe du coin. Et qu’elle utilise si bien.

Car Evelyne Coutas est photographe. Pas musicienne, photographe. Et depuis belle lurette. Toute petite déjà… Ses premiers clichés, elle les gardait pour elle dans sa chambre, jusqu’à ce beau soir du 14 janvier 1977 où elle rencontra, lors d’un concert d’Eddie & the Hot Rods au Bataclan, un fan de rock, un certain Virgil Finlay, qui voulait éditer un magazine de… rock.
Le titre “Sneakers” était une référence directe au 25 cm des Flamin’ Groovies que le groupe avait publié à “compte d’auteur”. C’est dire que c’était pointu, mais vachté éclectique. Le petit magazine, le journal, édité lui aussi à compte d’auteur, se planta dès le premier numéro. Manque de réalisme. L’enthousiasme ne fait pas tout. Hélas ! Toujours est-il que Coutas traîne ses Kickers et ses Clarks, en plus de sa mallette, un peu partout dans Paris. Et aussi entre Paris et Fresnes où elle réside alors. Elle, aux photos et à la cuve, Finlay, au micro et à la Hermès 2000, afin de stocker du matériel pour le magazine en gestation, ils font des interviouves mémorables. Bien souvent, les photographes rock institués de l’époque 76-70 ont vu ce petit bout de femme leur rafler subrepticement l’instant lumineux et magique où la star, titillée par Finlay, se lâche, oublie son statut pour redevenir une sorte de grand gamin. Car dans le rocker il y a aussi le mot cœur (moqueur ?), M’sieur Eddy dixit.
Et ses photos alors ? Plus que tout un chacun, Coutas est double. La preuve ? Les preuves ? Les voilà.

D’un côté, elle fait des photos d’art tendance création. C’est une plasticienne. Son créneau : le corps humain, omniprésent et représenté bien souvent par un être. En général seul. Ou bien par un unique élément du corps. Et quand bien même il y a deux ou trois quidams, ils sont dans des cadres fermés, des univers cloisonnés, qui renforcent l’idée de solitude ou d’abandon. Donc et logiquement, cette unicité de l’Homme séparé fait ressortir l’absence totale de groupe. Ou renforce la matérialité grégaire. C’est comme on veut. Or, le groupe, c’est ce qui, nous, nous intéresse….

Puisque voyez-vous, d’un autre côté, Coutas comme on l’a vu,  fait des photos hors-normes de rock stars. Bien souvent des portraits des mêmes stars, mais pas seulement. On laissera cependant de côté le portrait, car ce n’est pas vraiment le sujet de cette exposition.
Coutas saisit les rock’n’roll stars (c’est quand elles sont encore vivantes) ou les rock’n’roll heroes (c’est quand ils sont morts) dans leur élément naturel, celui où ils vivent à plein, celui pour lequel ils acceptent tout et n’importe quoi : la scène. Et son adrénaline. Cocktail explosif qui, par exemple, a permis aux Ramones de rester des années ensemble. Alors que Joey et Johnny ne se parlaient plus pour cause de nana : le guitariste avait piqué celle du chanteur, ce qui ne se fait pas et qui est loin d’être une posture radicalement établie ! La scène et ses instants magiques qui font dire à Keith Richards quand on lui pose la question (In : “Shine A Light”) : “What you feel just before jump on stage in front of 100 000 persons ? Réponse : “I wake up” !
Or le rock possède son cortège de clichés. La dope qui permet l’attente, les groupies qui soulagent, les tour-managers qui agencent, les guitars-techs qui accordent, les roadies qui installent. Et aussi les guindes et les micros dont le contre-point phallique est tellement ostensible. Autant d’impostures qui permettent la posture. Sex toys, rock toys.
Mais il est vrai que là-haut, à deux ou trois mètres au-dessus de la foule, on se sent comme Jupiter dans l’Olympe. Des dieux.
Les photos de 36 poses révèlent l’immense solitude des idoles sur la scène-olympe. Coutas n’a pris aucune photo de stars de ce mur installée sur scène. Elle les a toutes prises dans le public. Elles en haut, elle en bas. Un tour de force qui conforte cette “radicale posture” de nos groupes chéris. Mais où Coutas s’est attachée à démontrer que, finalement, chaque élément est souvent un électron solitaire, pas tout à fait libre et, au bout du compte, pas si isolé. Chacune des photos en est la parfaite illustration ! Si !

J’ai failli oublier ! Elle travaille surtout, voire uniquement, en noir et blanc. Plutôt en noir qu’en blanc du reste. C’est pas trop évident dans les portraits. Mais c’est particulièrement criant dans les séries de concerts. Car, embusquée dans le public, manquant de se faire étouffer contre les barrières – on ne dira jamais assez les souffrances qu’elle a supportées pour arriver à ces résultats ! – elle attend les instants de pénombre : quand les orgues de lumière sont shuntés et où les poursuites illuminent la cible… Alors, elle shoote. Pratiquement toujours sans flash. Le noir c’est une démarche qu’elle systématise. Parce qu’elle sait que les groupes, lorsqu’ils grimpent sur scène, se font accompagner par des lampes torches lorsque la salle est plongée dans le noir et que la tension monte. C’est cet instant, cette saillie, qu’elle veut prolonger.

Quoiqu’il en soit, ça donne ce mur de 3,20 sur 2,20 m. Quand on songe qu’elle fait 1,60 m. On y retrouve des attitudes radicales et totalement explicites des plus grands live on stage pour de vrai.  Les plus grands certes mais aussi des moins grands, des morts, des vivants et des morts-vivants. Car la brochette est belle ! Steve Tyler (en 76, déjà les narines dans les foulards); Mick Jagger (qui venait de découvrir les joies couillues du base-ball); Pete Townshend (pas encore sourdingue); Sting (avec un piano à ratiches refait à neuf); Patti Smith (avant qu’elle ne ressemble à un épouvantail); Alexis Korner (dont la sincérité est sublimée sur cette photo prise avec son éternelle ES295); Lee Brillaux (sans les biberons de houblons, cet homme n’existait pas); Bon Scott (lors du premier concert d’AC/DC à Paris le 17 octobre 1976, en première partie de Rainbow); Paul Weller (son visage est au-dessus de la semelle élimée). Et tout plein d’autres que vous verrez dans un losange qui tiendrait donc dans un rectangle parfait.
Car, si l’on cherche la petite bête allégorique, le losange c’est l’œil, le rectangle l’appareil et le tout parfait, ben c’est Évelyne Coutas toujours à la recherche du St Graal : la perfection.

On doit donc à Coutas la photo rock quasi parfaite. Des clichés enfin pris de l’endroit où ils auraient du toujours l’être : la fosse !
Pas commune la fille ! Pourtant, c’est pas tout et pas son unique apport au rock. Car, si l’on doit le “Black panda’s eyeliner” (qui a inspiré plus d’une punkette dans la période 77/78) à Gaye Advert (qui s’est rangée dans la défense des animaux), c’est Coutas à qui l’on doit le “Black racoon’s eyeliner”. Rien moins !

Ouèche !

Professor BeeB HôPô

Les questions et les réponses

1. Vos dix solos de guitare préférés ?
Tous ceux des “bons”, toutes époques confondues.

2. Les dix solos de guitare que vous détestez ?
Tous les solos sans fin des groupes type “Rock FM”.

3. Votre plus grand morceau de musique ?
“Tommy”, si l’on considère le LP comme un seul morceau
Ou “Sergent Peppers”, à la même condition.

4. Le son, le bruit que vous aimez ?
Le silence après le bruit.

5. Le son, le bruit que vous détestez ?
La “muzak” dans les restaurants, les pubs, les ascenseurs et les supermarchés….

6. Votre premier matériel ?
Boîtier réflex 24×36 Mamiya et 3 optiques fixes.

7. Votre matériel actuel ?
Nikon F3 et Nikon D3S

8. Votre première guitare ?
Guitare Folk Rockkoman

9. Vos guitares actuelles ?
La même (mais sans en jouer).

10. Votre juron, gros mot ou blasphème favori ?
Bor.el de di.u !

11. Vos souvenirs de musicien, le meilleur et/ou  le pire ?
Le meilleur: mon premier concert des Who en 74
Le pire: l’interview de Robert Gordon en 79.

12. Homme ou femme pour illustrer un nouveau billet de banque ?
Pas de visage sur un billet de banque, juste des chiffres.

13. Le métier que vous n’auriez pas aimé faire ?
Tout métier quel qu’il soit fait par non-choix.

14. La plante, l’arbre ou l’animal dans lequel vous aimeriez être réincarné ?
L’un des mes deux chats.

15. Si Dieu existe, qu’aimeriez-vous, après votre mort, l’entendre vous dire ?
Évelyne !

16. Si vous n’étiez pas marié/e et que vous puissiez faire l’amour
à un/e acteur/trice, qui serait-il/elle ?
Aucun.

17. Vos projets ?
Tenter de finaliser tout ce que je veux faire et n’ai pas encore fait.

 

Le site d’Evelyne Coutas

Professor
A propos Professor 362 Articles
- Gabba Gabba Hey ! - Hey Ho Let’s Go ! - Wop Bop A Loo Bop A Lop Bam Boom ! - Bop Bop Ba Doo Bop ! - Beedoo beedoo beedoo, beedoo wap -hun hun - Bip Bop Boum - Pom Pom Pi Dou - Papa Mmm Papa Mow Mow - M'enfin

Soyez le premier à commenter

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*